Le spiritisme, courant philosophique et spirituel apparu au XIXe siècle, repose sur la croyance en la communication avec les esprits des défunts. Explorons son histoire, ses pratiques emblématiques et son influence durable en France.
Origines et histoire du spiritisme
Le spiritisme est un mouvement spirituel et philosophique qui trouve ses origines au milieu du XIXe siècle, avec les premières manifestations rapportées de communication avec l'au-delà. Depuis ses débuts aux États-Unis jusqu'à son développement en France sous l'impulsion d'Allan Kardec, le spiritisme a connu une popularité croissante et s'est structuré en une doctrine à part entière.
Les débuts du spiritisme à Hydesville
C'est en 1847, dans le petit village d'Hydesville dans l'État de New York aux États-Unis, que les sœurs Fox rapportent pour la première fois des phénomènes étranges : des coups frappés semblant provenir des murs et des meubles de leur maison. Elles affirment pouvoir communiquer avec l'esprit d'un colporteur assassiné via un code basé sur le nombre de coups. Cette histoire attire rapidement l'attention et marque le début d'un engouement pour les séances de spiritisme.
Dès 1852, le phénomène des tables tournantes, où les participants tentent d'entrer en contact avec les esprits en posant leurs mains sur une table, se répand en Angleterre puis en France. De nombreux salons parisiens s'adonnent à cette pratique, suscitant curiosité et débats.
L'arrivée d'Allan Kardec et la structuration du spiritisme
En 1854, Hippolyte Léon Denizard Rivail, un pédagogue français plus connu sous le pseudonyme d'Allan Kardec, s'intéresse au phénomène des tables tournantes. Il fréquente des séances où des médiums, souvent de jeunes filles, affirment transmettre les messages des esprits. Kardec compile et analyse ces communications, cherchant à en dégager une doctrine cohérente.
Le 18 avril 1857, il publie Le Livre des Esprits, ouvrage fondateur du spiritisme. Il y expose les principes de base de cette philosophie spiritualiste : l'existence de Dieu, l'immortalité de l'âme, la réincarnation, la communication avec les esprits... Le succès est immédiat, avec de nombreuses rééditions. Kardec fonde la Revue Spirite en 1858 et crée la Société parisienne des études spirites pour approfondir et diffuser ses idées.
L'essor du mouvement spirite
Dans la seconde moitié du XIXe siècle, le spiritisme gagne en popularité en France et à l'international. Kardec publie d'autres ouvrages de référence comme Le Livre des Médiums (1861), L'Évangile selon le Spiritisme (1864) ou Le Ciel et l'Enfer (1865). À sa mort en 1869, des personnalités comme Camille Flammarion et Gabriel Delanne prennent le relais pour promouvoir la doctrine spirite.
Des congrès spirites internationaux sont organisés, rassemblant des milliers de participants, comme à Paris en 1889 et 1900 ou à Londres en 1922. En 1925, le spiritisme compterait entre 4 et 5 millions d'adeptes en France. Des écrivains et artistes comme Victor Hugo ou Conan Doyle s'intéressent au spiritisme, contribuant à sa diffusion dans les milieux culturels.
Malgré des controverses et des accusations de fraude visant certains médiums, le spiritisme s'est ainsi développé en un véritable mouvement socio-culturel, porteur d'une vision du monde et de l'au-delà qui a marqué son époque et trouvé un large écho dans la société.
Principes et croyances fondamentales du spiritisme
Le spiritisme, tel que codifié par Allan Kardec au XIXe siècle, repose sur un ensemble de principes et de croyances fondamentales qui définissent cette doctrine philosophique et spirituelle. Au cœur de ces enseignements se trouvent la foi en l'immortalité de l'âme, la communication avec les esprits des défunts, et l'idée de réincarnation comme moyen de progression morale et intellectuelle.
La réincarnation et l'évolution des esprits
Selon la doctrine spirite, l'âme humaine est immortelle et passe par une série d'incarnations successives dans différents corps physiques. Chaque vie terrestre est considérée comme une étape dans un long processus d'évolution spirituelle, où l'esprit acquiert des connaissances et développe ses qualités morales. Kardec affirme que "le but de la réincarnation est le perfectionnement de l'âme" (Le Livre des Esprits, question 166).
Les spirites croient que l'esprit conserve son individualité et sa mémoire à travers les différentes vies, mais que les détails des existences passées sont généralement oubliés lors de chaque nouvelle incarnation. Cependant, certains individus particulièrement avancés spirituellement peuvent avoir accès à des souvenirs de leurs vies antérieures.
La communication avec les esprits
Un autre principe central du spiritisme est la possibilité de communiquer avec les esprits des personnes décédées. Kardec explique que les esprits désincarnés peuvent interagir avec les vivants par le biais de médiums, des individus doués d'une sensibilité particulière qui leur permet de percevoir et de transmettre les messages des esprits.
Plusieurs techniques sont utilisées pour faciliter cette communication, notamment :
- Les séances de tables tournantes, où les participants posent leurs mains sur une table qui se met à bouger et à frapper des coups pour épeler des messages.
- L'écriture automatique, où le médium entre dans un état de transe et laisse sa main être guidée par un esprit pour écrire des messages.
- L'incorporation, où le médium permet à un esprit de prendre temporairement le contrôle de son corps pour parler ou agir.
La nature des esprits et les lois morales
Kardec enseigne que les esprits sont classés selon une hiérarchie spirituelle basée sur leur degré d'avancement moral et intellectuel. Les esprits supérieurs sont bienveillants et cherchent à guider l'humanité, tandis que les esprits inférieurs peuvent être malveillants ou simplement ignorants.
Le spiritisme met l'accent sur l'importance de suivre les lois morales universelles, telles que la charité, la bienveillance et la justice. Les actions des esprits, comme celles des incarnés, sont soumises à la loi de cause à effet, appelée "loi du karma" dans d'autres traditions. Ainsi, chaque esprit récolte les conséquences de ses actes au fil de ses différentes existences.
Le spiritisme kardéciste propose une vision du monde où l'évolution spirituelle de chaque individu se poursuit à travers de multiples vies, guidée par les enseignements des esprits supérieurs et les lois morales universelles. La communication avec l'au-delà est considérée comme un moyen d'accéder à la sagesse spirituelle et de progresser sur le chemin de la perfection morale.
Diffusion et influence du spiritisme en France
Le spiritisme, codifié par Allan Kardec dans les années 1850, a connu une diffusion rapide et une influence significative en France au cours de la seconde moitié du XIXe siècle. Cette doctrine spirituelle, fondée sur la croyance en la communication avec les esprits des défunts et en la réincarnation, a suscité l'engouement de nombreux adeptes et a eu un impact notable sur la société française de l'époque.
Essor du spiritisme après la publication des œuvres d'Allan Kardec
La publication des ouvrages fondamentaux d'Allan Kardec, tels que Le Livre des Esprits en 1857 et Le Livre des Médiums en 1861, a marqué le point de départ de la diffusion du spiritisme en France. Kardec a posé les bases de cette doctrine en définissant ses principes, ses croyances et ses pratiques, attirant ainsi l'attention d'un public de plus en plus large.
La création de la Revue spirite en 1858 a également contribué à la propagation des idées spirites. Cette publication mensuelle, dirigée par Kardec lui-même, servait de tribune pour exposer les enseignements du spiritisme, relater les expériences médiumniques et débattre des questions philosophiques et morales soulevées par cette doctrine. La revue a rapidement gagné en popularité, touchant un lectorat croissant à travers la France.
En 1858, Kardec fonde la Société parisienne des études spirites, qui devient un lieu de rencontre et d'échange pour les adeptes du spiritisme. Cette société organise des séances expérimentales, des conférences et des débats, permettant ainsi de consolider la communauté spirite naissante et de recruter de nouveaux membres.
Impact social du spiritisme
Au-delà de son aspect spirituel, le spiritisme a eu un impact social notable en France. Les spirites, guidés par les principes de charité et de solidarité prônés par Kardec, se sont engagés dans diverses œuvres philanthropiques. Ils ont mis en place des caisses de secours pour venir en aide aux plus démunis, organisant des collectes et des distributions de vivres et de vêtements.
Les spirites ont également joué un rôle pionnier dans la création des premières crèches en France. Conscients de la nécessité de soutenir les mères ouvrières, ils ont établi des structures d'accueil pour les enfants en bas âge, permettant ainsi aux femmes de concilier travail et maternité. Ces initiatives témoignent de l'engagement social des spirites et de leur volonté d'améliorer les conditions de vie des classes populaires.
Popularité croissante du spiritisme en France
La popularité du spiritisme en France a connu une croissance remarquable dans les années 1860. En 1862, on estimait à environ trente mille le nombre de spirites dans le pays. Les adeptes se réunissaient régulièrement dans des groupes d'étude et de pratique, échangeant leurs expériences et approfondissant leur compréhension de la doctrine.
Kardec lui-même a entrepris des voyages à travers la France pour propager les enseignements du spiritisme. Ses conférences attiraient des salles combles, témoignant de l'intérêt grandissant du public pour cette nouvelle philosophie spirituelle. Les villes de province ont ainsi vu naître de nombreux centres spirites, contribuant à l'enracinement du mouvement dans tout le pays.
À la fin du XIXe siècle, le spiritisme touchait plus d'un demi-million de personnes en France, avec des ramifications dans le monde entier. Cette expansion rapide et cette influence croissante attestent de la résonance profonde que le spiritisme a trouvée dans la société française de l'époque, répondant à une quête de sens et de spiritualité dans un contexte de mutations sociales et culturelles.
Critiques et controverses autour du spiritisme
Le spiritisme, qui a connu un grand succès en France dans la seconde moitié du XIXe siècle, n'a pas été épargné par les critiques et les controverses. Dès ses débuts, ce mouvement a suscité des oppositions de la part de l'Église catholique, du monde scientifique et de certains courants de pensée concurrents.
Accusations de fraude et supercheries
L'une des principales critiques adressées au spiritisme concerne les accusations de fraude et de supercherie. De nombreux cas de médiums prétendant communiquer avec les esprits ont été démasqués comme de simples illusionnistes. Parmi les exemples les plus célèbres, on peut citer :
- Les sœurs Fox, considérées comme les pionnières du spiritisme aux États-Unis, qui ont avoué en 1888 avoir produit elles-mêmes les bruits attribués aux esprits en faisant craquer leurs orteils.
- La médium italienne Eusapia Palladino (1854-1918), qui a été prise en flagrant délit de tricherie lors de séances spirites, utilisant des techniques d'illusionnisme pour faire croire à des phénomènes paranormaux.
Ces révélations ont porté un coup à la crédibilité du spiritisme et ont alimenté les soupçons de fraude généralisée au sein du mouvement.
Opposition de l'Église catholique
L'Église catholique s'est fermement opposée au spiritisme, considérant cette pratique comme contraire à la doctrine chrétienne et potentiellement dangereuse pour la foi des fidèles. En 1917, le Saint-Office a publié un décret interdisant formellement aux catholiques de participer à des séances spirites, sous peine d'excommunication.
Les autorités ecclésiastiques ont mis en garde contre les risques de manipulation psychologique et de possession démoniaque liés à la communication avec les esprits. Elles ont également dénoncé le caractère hérétique de certaines croyances spirites, comme la réincarnation, qui s'opposent à la notion chrétienne de résurrection.
Scepticisme du monde scientifique
Le monde scientifique s'est montré très sceptique à l'égard des phénomènes spirites, les considérant comme le fruit de l'illusion, de la suggestion ou de la fraude. Des chercheurs ont tenté de reproduire les manifestations attribuées aux esprits dans des conditions contrôlées, sans succès.
Le physiologiste français Charles Richet (1850-1935), prix Nobel de médecine, a étudié de nombreux médiums et assisté à des séances spirites. Bien que convaincu de la réalité de certains phénomènes paranormaux, il a conclu que la plupart des manifestations spirites étaient dues à des causes naturelles ou à des supercheries.
Tensions avec d'autres mouvements
Le spiritisme a également été en tension avec d'autres mouvements ésotériques et spiritualistes de l'époque, comme l'occultisme et la théosophie. Ces courants proposaient des explications alternatives aux phénomènes spirites et critiquaient certains aspects de la doctrine d'Allan Kardec.
L'occultiste Éliphas Lévi (1810-1875) a ainsi accusé le spiritisme de favoriser les influences néfastes et les obsessions, tandis que la théosophe Helena Blavatsky (1831-1891) a dénoncé les pratiques spirites comme une forme de nécromancie et de commerce avec les âmes des défunts.
Malgré les efforts de certains spirites pour prouver la véracité des phénomènes paranormaux, notamment par le biais d'expériences scientifiques, les controverses et les accusations de fraude ont contribué au déclin progressif du mouvement spirite en France à partir du début du XXe siècle. Néanmoins, le spiritisme a laissé une empreinte durable dans l'histoire des idées et des pratiques spirituelles, ouvrant la voie à de nouveaux courants comme la parapsychologie et le New Age.
Le spiritisme aujourd'hui : pratiques et influence moderne
Bien que critiqué et controversé, le spiritisme continue d'être pratiqué et d'influencer la culture moderne dans de nombreux pays à travers le monde. Ses adeptes perpétuent les enseignements d'Allan Kardec et expérimentent la communication avec l'au-delà à travers diverses méthodes.
Une présence internationale
Aujourd'hui, le spiritisme est présent dans une trentaine de pays, avec une concentration particulièrement forte en Amérique latine. Le Brésil compte à lui seul plusieurs millions de pratiquants et le spiritisme y est reconnu comme une religion à part entière. D'autres pays comme l'Argentine, le Mexique, Cuba ou encore le Venezuela ont également d'importantes communautés spirites.
En Europe, le spiritisme reste actif dans des pays comme la France, le Royaume-Uni, l'Espagne ou le Portugal, bien que dans une moindre mesure qu'en Amérique latine. Aux États-Unis, berceau du mouvement spiritualiste moderne, le spiritisme garde aussi des adeptes.
Pratiques contemporaines
Les séances de spiritisme, où un médium tente d'entrer en communication avec les esprits des défunts, restent l'une des pratiques les plus emblématiques du mouvement. Ces séances peuvent impliquer l'utilisation de tables tournantes, de coups frappés ou encore l'écriture automatique.
La planche ouija, popularisée au début du XXe siècle, est un autre outil fréquemment utilisé par les spirites modernes. Ce "jeu" censé permettre de communiquer avec l'au-delà est devenu un élément incontournable de la culture populaire, apparaissant régulièrement dans la littérature, le cinéma ou les séries télévisées.
Organisations et adeptes
Plusieurs organisations spirites internationales, comme le Conseil Spirite International fondé en 1992, fédèrent les différents groupes et associations à travers le monde. Selon leurs estimations, le spiritisme compterait plus de 20 millions d'adeptes réguliers dans 84 pays.
Parmi les figures publiques ayant contribué à populariser le spiritisme, on peut citer Sir Arthur Conan Doyle, créateur de Sherlock Holmes, qui fut un ardent défenseur de la cause spirite dans la première moitié du XXe siècle. Plus récemment, des célébrités comme l'actrice américaine Shirley MacLaine ont également affiché leur intérêt pour la philosophie spirite.
Influence sur d'autres courants
Le spiritisme a influencé de nombreux courants spiritualistes et ésotériques apparus à la fin du XIXe et au début du XXe siècle, comme la théosophie d'Helena Blavatsky ou l'anthroposophie de Rudolf Steiner. Certains concepts spirites, comme la réincarnation ou la communication avec les esprits, se retrouvent ainsi dans diverses croyances de la nébuleuse New Age.
Bien que contesté par la science et l'Église, le spiritisme a su s'adapter à la modernité et continuer à séduire de nouveaux adeptes, perpétuant ainsi l'héritage d'Allan Kardec plus de 150 ans après la publication du Livre des Esprits.
L'essentiel à retenir sur le spiritisme en France
Bien qu'ayant connu son apogée au XIXe siècle, le spiritisme conserve encore une influence dans la culture populaire et les pratiques spirituelles contemporaines. Si son côté controversé persiste, notamment ses accusations de fraude, son héritage intellectuel et philosophique demeure indéniable, en offrant une doctrine structurée autour de la réincarnation et du développement moral des âmes immortelles.
Questions en rapport avec le sujet
Qui pratique le spiritisme ?
Le spiritisme se définit comme une croyance ou une pratique employée pour établir le contact avec des esprits défunts. La pratique de cette science occulte se fait par des gens de toutes cultures et religions à la recherche d'une vérité spirituelle ou d'un contact avec leurs êtres chers décédés.
Pourquoi faire du spiritisme ?
Croyances. Le spiritisme cherche surtout à faire la preuve de la survie de la personne après la mort, c'est pourquoi il met l'accent sur le contact avec les esprits des personnes décédées. Les spirites ne sont pas des diseurs de bonne aventure.
Qu'est-ce qu'une personne Spirit ?
Adepte du spiritisme; en partic., personne qui a la faculté d'entrer en communication avec les esprits. Synon. médium, spiritiste (rare, dér.)
Qui a créé le spiritisme ?
Allan Kardec (1804-1869), fondateur de la philosophie spirite et inventeur du mot « spiritisme ».